Affaires économiques

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Ce texte porte des mesures positives mais manque de vision globale et cohérente

Économie circulaire : conclusions de la commission mixte paritaire -

Par / 30 janvier 2020

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est un euphémisme que de dire que ce projet de loi a suscité le débat : à preuve, il est passé de 13 à 130 articles. Fait rare, son examen au Sénat s’est même terminé par une seconde délibération, qui nous a laissé un goût amer puisqu’il s’agissait de revenir, à la hussarde, sur plusieurs avancées.

Au total, nous avons tout de même voté ce texte, compte tenu des progrès notables qu’il comporte : fait assez rare pour être souligné, dix-huit de nos amendements ont été adoptés !

Par ailleurs, dans sa grande sagesse, le Sénat a rejeté la consigne pour recyclage plastique, qui suscitait l’indignation légitime des acteurs du secteur. Il faut le dire, cette mesure reflétait la puissance des lobbies qui, avec votre complicité, madame la secrétaire d’État (Mme la secrétaire d’État proteste.), avaient trouvé le moyen de faire de nouveaux profits en menaçant l’équilibre du service public des déchets, géré par les collectivités territoriales, et en faisant payer deux fois les ménages, au prétexte de la transition écologique…

L’Assemblée nationale a respecté les travaux du Sénat et introduit quelques ajouts intéressants. Toutefois, nous regrettons l’opacité des travaux de la commission mixte paritaire et la quasi-absence de possibilité, pour les parlementaires, d’y intervenir.

Sur le fond, je commencerai par une remarque générale : certes, ce texte contient des mesures positives, mais il manque d’une vision globale et cohérente. Il est vain d’imaginer promouvoir réellement l’économie circulaire sans agir de manière plus forte sur notre modèle de production et en appréhendant ces questions sous le seul angle de la réglementation de la consommation.

Soyons clairs : à nos yeux, poser la question de la surproduction, entraînant la surconsommation et donc la multiplication des déchets, exige une remise en cause globale du système dans lequel nous vivons, qui, intrinsèquement, se fonde sur l’exploitation des ressources et la destruction de notre environnement. On n’en est pas là ! Comme le disait un ancien ministre, il s’agit là d’un ordre « cannibale », contraire à toute idée de transition écologique sérieuse, puisque la finitude est elle-même source de profits, hors toute considération sociale ou sanitaire.

Il est vraiment temps de reprendre la main. Que produit-on, pour qui et dans quelles conditions ? Il nous appartient de répondre à ces questions, sans laisser aux marchés financiers et aux accords de libre-échange le soin de le faire.

Madame la secrétaire d’État, vous qualifiez ce discours de « populisme vert » (Mme la secrétaire d’État fait un signe de dénégation.), mais le vrai populisme, c’est de continuer à faire croire que l’on peut, par de simples mesurettes, écarter le péril écologique. Du fait de cette schizophrénie, ce texte ne permettra pas de réduire drastiquement les déchets à la source.

Au-delà de cette remarque générale, plusieurs points positifs sont à souligner. Je pense à la lutte contre l’obsolescence programmée, et notamment logicielle, à la définition du vrac et à sa promotion, à la lutte contre le suremballage et le gaspillage des invendus par la création d’un fonds de réemploi, même si la portée de cet outil a été fortement limitée. Je pense également à la promotion du réemploi dans la commande publique et à l’interdiction de certains usages des plastiques.

Nous avons un regret au sujet des filières REP : nous souhaitions élargir leur gouvernance, afin d’y apporter de la transparence et de mieux prendre en compte l’intérêt des consommateurs. Nous avions également alerté, sans succès, quant aux conditions de travail des salariés de ces filières, qui souffrent d’exposition à des matières nocives pour la santé.

Deux sujets ont particulièrement polarisé nos débats : la lutte contre le plastique et la consigne.

Le Sénat avait adopté notre amendement tendant à rétablir la véritable consigne, c’est-à-dire celle du verre dans les cafés, hôtels et restaurants, qui prévalait jusqu’en 1989. La seconde délibération est revenue sur cet acquis, mais, à nos yeux, la seule consigne qui ait du sens est la consigne pour réemploi, donc celle du verre. En définitive, le compromis trouvé en commission mixte paritaire renvoie à plus tard la mise en œuvre de la fausse consigne pour recyclage, laissant le temps aux collectivités territoriales d’atteindre les objectifs définis par l’Union européenne. Ce flou artistique suscite notre méfiance.

Au sujet du plastique, les débats ont permis de sortir de la seule problématique du recyclage, pour aller vers une interdiction pure et simple.

Nous sommes satisfaits d’avoir pu élargir les termes du débat en passant d’une discussion sur les contenants, objets ou activités spécifiques, comme la restauration ou le plastique oxodégradable, à la définition d’un objectif global de sortie du plastique à usage unique. Beaucoup reste à faire et, évidemment, la date de 2040 apparaît lointaine, mais les termes du débat de fond sont du moins posés. Il faut aller vers la fin du plastique : nous avions déposé un amendement en ce sens, dont le dispositif a été supprimé en seconde délibération, à la demande du Gouvernement, avant d’être repris à son compte par ce dernier, qui en a fait, à l’Assemblée nationale, la mesure phare du texte…

Pour l’heure, malgré nos griefs, nous voterons ce projet de loi, même s’il conserve de nombreuses incohérences, en espérant que les nombreux décrets d’application ne viendront pas en raboter l’ambition !

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