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Indemnisation des prud’hommes

Par / 21 novembre 2006

Madame la ministre, j’ai souhaité appeler une nouvelle fois l’attention du garde des sceaux sur la réforme du financement des activités prud’homales que le Gouvernement veut faire adopter.

À la suite des vives critiques exprimées par l’ensemble des organisations syndicales dès la présentation de cette réforme au Conseil supérieur de la prud’homie le 5 mai 2006, j’avais interpellé M. le garde des sceaux au moyen d’une question écrite.

En dépit de sa réponse rapide, dans des termes qui se voulaient de surcroît rassurants, j’estime que ce projet de réforme, rejeté par les juges concernés au premier chef, demeure toutefois marqué par la volonté du Gouvernement de remettre en cause purement et simplement l’existence des conseils de prud’hommes.

Sous prétexte d’« encadrer » l’activité prud’homale, ce projet vise en réalité à limiter les moyens d’indemnisation des juges prud’homaux et, par là même, le temps que pourront consacrer les conseillers prud’homaux à chaque dossier.

Contrairement aux affirmations du Gouvernement et malgré les artifices sémantiques employés, la réforme en question revient à imposer la forfaitisation de l’indemnisation des conseillers prud’homaux, qui se verront contraints de rédiger les jugements en trois heures, les ordonnances en une heure et les rapports et procès-verbaux en trente minutes, quelles que soient la nature et la complexité des dossiers à traiter.

Il va sans dire que cette réforme va diminuer de façon drastique les moyens matériels et humains de la juridiction prud’homale, déjà très insuffisants, et porter atteinte aux droits des justiciables, à la fonction de magistrat.
Au-delà, j’y vois une attaque contre les droits des travailleurs et les conventions collectives. J’estime, pour ma part, que l’on ne doit pas sacrifier la justice prud’homale de notre pays sur l’autel de considérations budgétaires, a fortiori si elles tiennent à des présupposés idéologiques.

En revanche, compte tenu de leur spécificité, il convient de donner à ces juges, qui ne sont pas des professionnels, le temps nécessaire à la rédaction de jugements de qualité, temps qui varie en fonction de la complexité du dossier à traiter, de l’expérience, de l’ancienneté ou de la formation du rédacteur.

Les conseillers prud’homaux sont très inquiets quant à l’avenir de la justice prud’homale, d’autant plus que, selon une méthode pour le moins singulière, le Gouvernement et sa majorité soufflent le chaud et le froid en la matière.

Quelle est, en effet, cette méthode qui consiste à inscrire une réforme de la prud’homie dans le projet de loi pour le développement de la participation et de l’actionnariat salarié, puis à la faire supprimer dès son passage à l’Assemblée nationale, avec l’appui de la majorité parlementaire de droite, par la voix de M. Ollier, au motif qu’elle aurait vocation à figurer dans le projet de loi de finances, pour la faire réapparaître ensuite au Sénat, grâce à un amendement déposé par M. Hyest et les membres du groupe UMP ? À quoi jouent donc le Gouvernement et sa majorité parlementaire ?

Ils voudraient étouffer la mobilisation des conseillers prud’homaux, qui ont manifesté contre ce projet de réforme à plusieurs reprises, qu’ils ne s’y prendraient pas autrement !

Madame la ministre, le garde des sceaux va-t-il prendre, aujourd’hui même, l’engagement de revenir sur cette réforme figurant désormais à l’article 30 A du texte pour le développement de la participation et l’actionnariat salarié et portant diverses dispositions d’ordre économique et social, texte qui doit encore être examiné par une commission mixte paritaire avant son adoption définitive ?
Va-t-il s’engager à rouvrir les discussions avec les partenaires sociaux, qui ont des propositions concrètes à formuler pour l’amélioration du fonctionnement et du financement des conseils de prud’hommes, en vue de parvenir enfin à un accord sur cette importante question ?

Mme Nelly Olin, ministre de l’écologie et du développement durable.

Madame le sénateur, vous avez bien voulu appeler l’attention de M. le garde des sceaux sur l’indemnisation des conseillers prud’hommes.
Le régime juridique actuellement applicable repose sur des textes anciens, dont l’interprétation a conduit, au fil des années, à des pratiques hétérogènes sur l’ensemble du territoire.

Dans le prolongement du rapport qui a été remis par le procureur général honoraire Henri Desclaux, le 5 octobre 2005, et qui a été bien accueilli par les organisations syndicales, un projet de loi et deux projets de décret ont été rédigés après avoir recueilli les observations du Conseil supérieur de la prud’homie.
Le projet de réforme exclut toute forfaitisation et retient un système d’indemnisation reposant sur l’activité réelle des conseillers.

Un des projets de décret détermine les durées moyennes de rédaction des décisions rendues par les conseillers prud’hommes : trente minutes pour un procès-verbal, une heure pour une ordonnance et trois heures pour un jugement.
Il prévoit également que ces durées pourront être dépassées, sur autorisation de la formation de jugement, lorsque la complexité du dossier, le nombre de parties à l’instance et la multiplicité des chefs de demande le justifient.

Par ailleurs, les projets de texte visent à augmenter le nombre d’activités indemnisables, à améliorer la prise en charge des frais de déplacement des conseillers prud’hommes et à majorer de 15 % le taux de vacation.
Dès lors, pour le bon fonctionnement de la justice prud’homale, il semble indispensable de finaliser cette réforme assurant une meilleure indemnisation des conseillers prud’hommes, afin de prévoir un dédommagement qui soit le juste reflet de leur activité pour le service public de la justice.

Mme Éliane Assassi.

Madame la ministre, je vous remercie des éléments de réponse que vous venez de nous apporter.
Toutefois, je me permets d’insister sur le fait que les juges consulaires sont très inquiets quant à l’avenir de leur activité, et ils ont raison de l’être, sachant qu’aucun consensus n’a été trouvé, ni même recherché, semble-t-il.

Le Gouvernement pousse ainsi les juges consulaires, mobilisés pour défendre le service public de la justice prud’homale, à suspendre des audiences, à titre de protestation. Le Gouvernement prend donc toute la responsabilité des conséquences de ces actions revendicatives.

Or la question de la prud’homie est très importante, puisqu’elle touche au droit du travail. On a bien vu le rôle qu’ont joué ces juridictions, notamment au regard du « contrat nouvelles embauches », ou CNE.
Il n’est pas étonnant que le Gouvernement, aiguillonné par le patronat, souhaite remettre en cause l’activité de ces juges, qui se permettent de remettre en cause le dispositif du CNE !

À cet égard, je tiens à rappeler la circulaire du 8 mars 2006 par laquelle le ministre de la justice ordonne aux procureurs généraux d’intervenir systématiquement dans les procédures prud’homales concernant le CNE et de faire appel des décisions visant à le remettre en cause.
Ces textes sont sous-tendus par une logique, politique et patronale, qui entend « casser » le code du travail et toutes les garanties qu’il apporte aux salariés.
La juridiction prud’homale joue un rôle essentiel, je le répète, dans la défense du droit du travail, notamment pour les salariés les plus exposés, et elle fonctionne, comme vous l’avez rappelé, grâce aux compétences et à l’engagement de femmes et d’hommes qui méritent de la considération.

Telles sont les raisons pour lesquelles je tenais à interpeller M. le garde des sceaux sur ce thème. J’ajoute que la réponse ministérielle de ce jour est très attendue par les juges prud’homaux.

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