La gestion solitaire par le Président de la République n’est plus acceptable

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la crise est toujours là et la menace d’une nouvelle vague de l’épidémie se fait sentir.
Nous l’avons dit et répété, et nous le ferons encore et toujours, malgré la lassitude qui pourrait nous gagner : l’urgence n’est plus là. Rien ne peut plus justifier aujourd’hui la perpétuation d’un état d’exception qui met à l’écart le Parlement et porte atteinte, dans un même mouvement, à des libertés essentielles de nos concitoyens. Comment accepter, par exemple, le nouveau rôle dévolu aux directeurs d’école, désormais habilités à exercer une forme de police sanitaire ?

Nous l’avons dit et répété, la conviction démocratique devrait exiger que le Parlement décide et que le Parlement prenne le temps de décider.

Prenons ce débat. Pourquoi une telle précipitation ? Madame la ministre, la France n’est plus à l’arrêt, l’épidémie a reculé grâce à la vaccination, même si la vigilance doit rester de mise. Pourquoi, dans ces conditions, continuer à pratiquer l’oukase, en ne laissant aux sénateurs que quelques jours – quelques heures aujourd’hui – pour examiner des dispositions engageant la vie quotidienne et les libertés de notre peuple pour les mois à venir ?
Nous l’avons dit et répété, le Parlement doit reprendre le pouvoir. Les assemblées peuvent être saisies à tout instant, de nuit comme de jour, y compris pendant l’interruption des travaux liée aux prochains scrutins électoraux, pour débattre, proposer, voter.

La gestion solitaire de la crise sanitaire par Emmanuel Macron n’est plus acceptable. Il ne faut pas s’habituer à ces conseils de défense opaques, dépourvus de fondement constitutionnel, où les décisions sanitaires se prennent. Dois-je rappeler, une fois encore, que la santé ne fait pas partie du domaine réservé du Président de la République ?

Il revient maintenant au Parlement de décider, par la loi, de chaque étape de l’action sanitaire, de manière régulière. Les libertés et la santé de notre peuple ne doivent plus être une affaire de décret ou d’ordonnance, mais bien une affaire reprise en main par ses représentants, par la démocratie.

La question de l’hôpital public est à ce titre symbolique. Le Gouvernement nous promène dans les méandres du passe sanitaire, de cette société de vigilance chère au Président de la République, alors que, dans le même temps, l’hôpital public connaît une crise sans précédent, faisant courir le risque d’un effondrement de notre système de santé en cas de nouvelle vague.
Oui, le Gouvernement fait courir de graves risques à notre pays en ne prenant pas les mesures d’urgence. Or là, il y a urgence, pour redresser l’hôpital public et rouvrir, ici et maintenant, les milliers de lits qui ont été fermés.

La suppression, par la majorité En Marche, de la demande de rapport votée par le Sénat sur l’initiative de notre groupe est, à cet égard, assez éclairante. L’Assemblée nationale a balayé les propositions du Sénat. Nous avions, pour notre part, alerté sur le danger d’essayer d’aménager un dispositif de restriction des libertés aussi fort que cet état d’urgence et son excroissance, le passe sanitaire. Si, dans le dispositif proposé, le cadre juridique de l’état d’urgence était supprimé, l’état d’esprit demeurait et permettait, de fait, le retour de la copie à l’original, jugé plus efficace.

C’est pourquoi nous avons voté contre le texte du Sénat. Certes, ce dernier améliorait fortement le dispositif gouvernemental, mais il ne s’opposait pas frontalement à la logique autoritaire et infantilisante qui est celle du Gouvernement.

Les sénatrices et sénateurs du groupe CRCE se prononcent clairement contre la prorogation de l’état d’urgence et du passe sanitaire. Ils rappellent que les nécessités de l’heure sont le redressement de l’hôpital public, la prise en compte du devenir des personnels souvent démissionnaires ou suspendus du fait de la non-vaccination, mais certainement pas cette captation du pouvoir par l’exécutif, qui accélère le passage à ce que nous appellerons non pas une société de vigilance, mais une société de surveillance.

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