Nous redoutons que les établissements privés à but lucratif aient la possibilité de conserver les gamètes

L’article 2 tend à autoriser l’autoconservation de gamètes pour des raisons non médicales et de manière déconnectée d’un don, dans la mesure où le dispositif actuel d’autoconservation contre don est contraire au principe de gratuité.

Si je ne m’oppose pas à cet article, je souhaite, comme je l’ai dit dans la discussion générale, rappeler quelques points.

D’abord, le remboursement partiel de cet acte est justifié par le fait qu’il s’agirait d’une technique de médecine préventive pour la prévention de l’infertilité, ce qui n’est pas sans poser de question. Ce qui m’interroge n’est pas tant le remboursement partiel de cet acte que la justification invoquée, en lien avec la « médecine préventive ». Qu’est-ce que cela signifie ?

Ainsi, au lieu de lutter contre les causes de l’infertilité, qui peuvent être d’ordre environnemental et liées aux perturbateurs endocriniens – nous y reviendrons dans le cadre de la discussion d’un autre amendement –, on adopte un raisonnement inverse : puisque l’infertilité guette pour des raisons qu’on tient à l’écart, agissons en conséquence et mettons nos gamètes à l’abri, pour y revenir ultérieurement sans qu’ils aient été altérés par l’environnement dans lequel nous vivons.

En outre, j’ai des doutes sur les motivations réelles des personnes qui auront recours à cette méthode : se préoccuperont-elles vraiment d’une infertilité probable ? Je ne le pense pas ! Elles agiront souvent sous la pression de la société dans son ensemble, qui véhicule un double mouvement contradictoire : d’une part, l’injonction à devenir mères, parce que les femmes ne seraient réellement « accomplies » qu’après avoir acquis ce « statut » ; d’autre part, l’appel à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, bien que les conditions de cette égalité ne soient pas encore assurées et qu’il ne s’agisse que d’un leurre camouflant largement la charge mentale assumée par les femmes.

Face à ces problématiques, je m’interroge sur la fausse bonne idée que pourrait représenter cette mesure d’autoconservation de gamètes. Dans quelle logique s’inscrit-elle au regard de l’émancipation des femmes ? Dans quelle mesure pallie-t-elle nos inactions en matière de politique familiale et environnementale ? Et je ne parle pas de la mesure visant à ouvrir aux établissements privés à but lucratif la possibilité de conserver les gamètes en question !

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