Un jackpot pour les entreprises

Monsieur le président, permettez-moi tout d’abord de remercier nos collègues du groupe Les Indépendants – République et Territoires d’être à l’initiative de ce débat. On doit effectivement s’interroger sur les raisons pour lesquelles le mécénat territorial s’est développé ces dernières années.

Il s’agit bien souvent pour les collectivités territoriales d’accéder à un fonds de trésorerie inaccessible et de combler ainsi les économies qui leur sont imposées, notamment au travers de la réduction des dotations qui s’est opérée au cours de ces dernières années et de celle qui est annoncée dans un avenir proche. Soit les collectivités territoriales réduisent la voilure des services publics locaux, soit elles trouvent d’autres sources de financement. À cet égard, le mécénat vient combler ce manque à gagner, même si c’est à la marge.

Du côté des entreprises mécènes, on peut voir la face optimiste de cette affaire, si je puis le dire ainsi. Il s’agit pour elles de participer ainsi aux infrastructures publiques. Mais, ne soyons pas naïfs ! La réduction substantielle d’impôt et la possibilité de choisir leur cause et ce qu’elles font de leur argent sont une opportunité à ne pas manquer. Dans la mesure où les dons ouvrent droit à une réduction d’impôt, les collectivités privent tout de même, monsieur le ministre, l’État de rentrées fiscales importantes. Au final, les seuls véritables gagnants de ce système sont les entreprises mécènes.

Je ne reviendrai pas sur les propos de nos collègues sur Notre-Dame ; nous aurons d’ailleurs l’occasion d’y revenir dans un avenir proche.

Je vous poserai une seule question, monsieur le ministre, pour être rapide : les collectivités auraient-elles eu recours au mécénat si l’État ne les y avait pas contraintes par des plans d’austérité ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Sébastien Lecornu, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales. Madame la présidente, je ne partage qu’à moitié, vous vous en doutez, la philosophie de votre intervention.

Il y a aussi une démarche citoyenne dans le fait de participer à un projet. Les entreprises concernées ne sont pas que les grandes entreprises ; il y a aussi des entreprises de proximité. On a beaucoup parlé de culture et de patrimoine depuis tout à l’heure, mais le sport entre également dans le champ du mécénat territorial.

M. Michel Savin. Vous n’en avez pas beaucoup parlé !

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je n’y suis pour rien si je n’ai pas eu trois quarts d’heure pour m’exprimer, monsieur le sénateur ! Je suis à la disposition du Sénat ! Si vous ouvrez la séance jusqu’à trois heures du matin, je pourrai vous parler de sport… (Sourires.)

La réalité, madame la présidente, c’est que le fait de réunir tous les acteurs d’un territoire autour d’un projet présente tout de même une dimension citoyenne. Associer des commerçants, des entrepreneurs, des citoyens fait souvent société locale. Je le vois par moi-même en présidant la fondation abritée à Vernon pour la collégiale de Vernon ou le musée des impressionnismes de Giverny…

M. Antoine Lefèvre. Cumul ! (Sourires.)

M. Sébastien Lecornu, ministre. Quand les gens participent à l’acquisition d’une œuvre, on fait société locale en réunissant tout le monde, y compris les entrepreneurs locaux.

Par ailleurs, j’évoquerai un point que votre question ne traite pas complètement : fondamentalement, le mécénat territorial – on n’a pas eu le temps de le dire suffisamment – est une opportunité pour les collectivités territoriales en termes d’investissements. Soyons clairs, c’est de l’argent en plus qui est versé sur la maquette financière d’un projet local.

Le véritable enjeu, concernant le mécénat, demeure ce qui concerne le fonctionnement, avec beaucoup de petits travaux du quotidien, des embellissements, des travaux de mise en sécurité, voire, tout simplement, la rémunération du personnel chargé de l’entretien. Ce sont là des questions de fonctionnement et non pas d’investissement. Or les choses sont beaucoup plus difficiles. C’est pour cette raison que vous vous réjouissez, madame la présidente, que le Gouvernement ne diminue plus la DGF des collectivités territoriales !

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