Des erreurs, des échecs, mais pas de changement de cap

Exercice traditionnel, mais particulièrement important dans ce contexte économique incertain et troublé, le contrôle du Parlement quant à l’exécution du budget a permis de relever un certain nombre de manquements du gouvernement.

Les données sur l’exécution de l’exercice 2020, ont permis de relativiser ce que le gouvernement et la droite s’étaient empressés de qualifier d’année noire pour les finances publiques[1]. En effet, les données économiques disponibles sont bien moins cataclysmiques qu’annoncées. Aussi, le déficit constaté est inférieur de 45,1 Md€ par rapport aux prévisions du projet de loi de finances rectificative voté le 23 novembre dernier. Cette « erreur » représente tout de même un quart du déficit global et plus de la moitié des 85,1 Md€ de surcroit de déficit liés à la crise sanitaire. Il est par conséquent légitime d’y voir une volonté délibérée du gouvernement de se poser en sauveur d’une situation qu’il a lui-même créée artificiellement.

Au regard des erreurs politiques et de l’écart en matière de prévision des finances publiques, le sénateur communiste du Val-de-Marne Pascal Savoldelli a interrogé ce matin le ministre chargé des comptes publics, O. Dussopt, sur la « nécessité d’un réel débat démocratique sur les finances publiques ». Il a insisté sur les presque 29 Md€ d’aides d’urgence destinées aux entreprises, aux salariés, aux citoyennes et aux citoyens, qui n’ont pas été utilisées. Il apparait par ces éléments que les aides d’urgences sont difficiles à percevoir pour les entreprises, les dossiers lourds et complexes : l’administration fiscale, dont les effectifs sont constamment réduits, est dépassée. Le sénateur a donc enjoint le gouvernement à réorienter cette somme pour « des dépenses concrètes » via des aides aux plus précaires et des investissements publics massifs.

Cette embellie budgétaire ne fera pas infléchir le gouvernement. Le ministre de l’économie et des finances rappelait devant le Sénat que le « premier principe fondateur de notre politique économique de l’offre, c’est la baisse des impôts [2] », et « en même temps » la mise en place de « réformes structurelles » telle que la réforme des retraites ou la réduction des dépenses publiques. Cet entêtement est d’autant plus incompréhensible et paradoxal que la France parvient à se financer sur les marchés financiers à des taux d’intérêt extrêmement bas, s’apparentant à une « valeur refuge ». Ces mots du sénateur communiste du Nord Eric Bocquet ont, pourtant, tous recueilli l’assentiment du ministre.

Le Groupe CRCE appelle donc à un véritable débat sur les orientations stratégiques en dépenses mais également en recettes, pour enfin sortir du décalage « entre l’inquiétude de nos gouvernants et la quiétude des marchés financiers » qui prêtent à la France dans des conditions extrêmement favorables.

[1] Voir sur ce point notamment : Renaud Honoré., « Budget : la France face au scénario d’une décennie noire pour son déficit public », Les Echos [en ligne], 14 octobre 2020. Disponible sur : https://www.lesechos.fr/economie-france/budget-fiscalite/budget-la-france-face-au-scenario-dune-decennie-noire-pour-son-deficit-public-1255365.

[2] Bruno Le Maire, présentation du projet de loi de finances pour 2021, Sénat, 30 septembre 2020.

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