Les objectifs visés sont de donner davantage d’autonomie aux collectivités locales polynésiennes

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le vendredi 1er février, Emmanuel Macron recevait les élus des outre-mer dans le cadre du grand débat national. Tous étaient conviés, excepté les représentants des territoires du Pacifique, notamment de Polynésie française. Comment expliquer cet impair du chef de l’État ? Les Polynésiens ne partagent-ils pas les revendications de très nombreux Français en termes de pouvoir d’achat, de lutte contre le dérèglement climatique et d’aspiration à plus de démocratie ?

Bien au contraire, la Polynésie française, avec ses 24 % de chômeurs et ses services publics défaillants, n’échappe malheureusement pas à la pauvreté massive, spécifique aux territoires ultramarins. Et sur les questions de démocratie, le passé colonial de la France a exacerbé l’importance de ces enjeux au sein de ce territoire.

Malgré ce manque de considération de la part du président Macron à l’endroit des Polynésiens, force est de constater que tant le projet de loi organique que le projet de loi dont nous allons débattre vont dans le bon sens.

L’assemblée de la Polynésie française a fait l’objet de consultations, certes à titre indicatif, et a rendu un avis favorable sur les deux textes présentés par l’exécutif.

Sur le fond, les objectifs visés sont de donner davantage d’autonomie aux collectivités locales polynésiennes, d’y introduire plus de démocratie et d’y stimuler la création d’emplois en permettant une approche plus adaptée aux besoins de ces îles.

L’exécutif semble avoir compris un élément essentiel : un territoire aussi spécifique que la Polynésie française ne peut être administré depuis Paris. Ainsi est-il proposé de donner davantage de compétences aux communes et de développer l’intercommunalité, notamment dans les domaines économique, énergétique, infrastructurel et éducatif. Par ce biais, il devrait être possible de réaliser des économies, afin d’investir davantage dans les services publics qui fonctionneront, espérons-le, avec plus d’efficacité. Cette mesure devrait également redynamiser le tissu économique local. Sur le plan démocratique, la réforme prévoit notamment la création de syndicats mixtes en Polynésie, acteurs essentiels du dialogue social et local. Ces éléments doivent évidemment être salués.

Finalement, l’un des écueils de cette réforme tient à la gestion de la question environnementale en Polynésie.

En son article 1er, le projet de loi organique prévoit la reconnaissance de la contribution de ce territoire au développement de la capacité de dissuasion nucléaire française.

Comme le signale le Conseil d’État dans son rapport, cette reconnaissance est un vœu pieux, dépourvu de toute portée normative. Cela est bien évidemment insuffisant.

Après avoir stimulé et accaparé l’économie polynésienne dans les années soixante, la fermeture du Centre d’expérimentation du Pacifique a entraîné une déstabilisation durable du marché de l’emploi local. Sur le plan environnemental, les atolls de la collectivité polynésienne ont été profondément touchés par les pollutions liées aux métaux lourds, aux hydrocarbures et aux radioéléments à longue durée de vie propagés par les essais nucléaires.

Il n’est aucunement proposé dans le projet de loi organique de s’investir davantage pour restaurer les atolls. De même, aucune nouvelle indemnisation n’est prévue pour les victimes ayant été exposées aux rayonnements nucléaires.

Madame la ministre, nous devons être plus ambitieux. Si nous voulons faire de la France la seconde zone économique marine mondiale, la Polynésie française n’est pas dépourvue d’atouts. Pour pallier économiquement et énergétiquement la fin du nucléaire polynésien, n’est-il pas temps d’investir davantage dans les énergies vertes ? Avec leurs nouvelles compétences, les communautés de communes et les syndicats mixtes polynésiens pourront impulser de telles innovations. Le rôle de l’État sera alors d’apporter un concours financier à ces projets.

L’État français a une dette morale et financière envers la Polynésie française. Il est grand temps qu’il se montre à la hauteur des espérances des habitants. Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera en faveur de ces textes.

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