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L’imposture des niches fiscales

Contribution à l’impôt -

18 mars 2019

Pour éviter le débat sur l’ISF et l’augmentation des salaires, le ministre du Budget, Gérald Darmanin, s’est récemment livré à une étonnante stratégie de contournement en s’épanchant sur le sujet des niches fiscales. Pensant ainsi se parer des atours du justicier social, celui-ci a notamment exprimé sa volonté de limiter l’octroi de certaines exonérations fiscales aux particuliers les plus à l’aise financièrement, notamment pour les crédits d’impôt sur la transition énergétique (nouvelles fenêtres, chaudières…). Les niches fiscales sont ce que l’on appelle de la « fiscalité dérogatoire ». Leur multiplication dénature notre système fiscal républicain fondé sur l’égalité. Non seulement il faut avoir connaissance de l’existence d’un dispositif pour en bénéficier, mais en plus ces niches visent trop souvent des catégories de personnes qui n’ont pas nécessairement besoin de l’aide de l’État.

Et il n’est pas rare que ces dispositifs permettent aux plus riches de trouver des techniques pour contourner leur contribution à l’impôt. Or depuis quarante ans, toutes ces exonérations fiscales ont consisté en une dépense fiscale en lieu et place de la dépense publique. Par exemple, en 1952, la rente Pinay a fait bénéficier bien des familles aisées d’une exemption fiscale, tant au niveau de l’impôt sur le revenu que des droits de succession. Autre exemple, dans les années 80, le financement de la dette publique par l’assurance vie fut une réponse au renoncement à l’usage de la « planche à billets » du passé. Mais comment ignorer que ce fût aussi une formidable opportunité pour les plus gros patrimoines, soumis à l’impôt sur les grandes fortunes, de bénéficier d’autres avantages fiscaux et exonérations. Quant à la loi bancaire et au lancement de l’assurance-vie, on se rend compte que trente ans après leur mise en place, 11 % de l’encours (soit près de 180 milliards d’euros) sont détenus par 0,5 % des assurés (soit moins de 300 000 personnes). Autant dire que la niche est confortable et le bénéficiaire loin d’être sur la paille…

Pourquoi alors, la position du ministre Darmanin relève-t-elle d’une imposture ? Tout d’abord, en opposant la ou le cadre qui sollicite une exemption d’impôt pour changer ses fenêtres à d’autres catégories de la population qui auraient, elles, véritablement besoin d’aide, on oppose les citoyens entre eux. Pour un gouvernement qui ne cesse de flatter les plus riches et de mépriser les plus pauvres, la remarque est pour le moins cocasse. Ensuite, le discours du ministre circonscrit le débat au seul champ (aussi étendu soit-il) des niches fiscales des particuliers, oubliant la puissante armada de celles dévolues aux entreprises, comme l’emblématique CICE. D’un coût annuel de 20 milliards d’euros, il a offert en moyenne 3 800 euros par an aux très petites entreprises et des centaines de millions d’euros à de gros groupes tels que Auchan ou Carrefour. Voilà une belle niche fiscale qui a coûté très cher aux Françaises et aux Français pour aller directement dans les poches des actionnaires sans aucun effet sur l’emploi.

Mais les exemples sont nombreux : le crédit d’impôt recherche (6,2 milliards) ou d’autres mesures -délicatement qualifiées de « mécanique de l’impôt » - portant sur le régime des groupes (17,6 milliards pour 46 500 entreprises), la niche Copé sur les cessions de titres (7 milliards d’euros), ou le régime d’intégration (16, 4 milliards pour 120 000 entreprises). Les propositions du ministre ne sont qu’une grossière technique de contournement du vrai sujet : la justice fiscale ! Il est grand temps de rétablir un système fiscal à la hauteur des valeurs de la République, pour plus d’égalité et de justice. Et pour cela, il faut revenir à la vraie dépense publique, dépenser directement l’argent pour les politiques que nous avons décidées démocratiquement, et que cesse ce gaspillage du produit de l’impôt sur le revenu, la consommation, ou encore les carburants.

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