Nos propositions de loi et de résolution

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Cette prestation sociale n’est plus en adéquation avec les évolutions sociales et sociétales

Versement des allocations familiales dés le premier enfant -

Par / 23 septembre 2011

Depuis plusieurs années, les allocations familiales font, soit l’objet de débats importants, soit de mesures législatives ou réglementaires qui tendent à réduire leur portée ou à leur conférer des missions qui ne sont pas et ne doivent pas être les leurs.

Ainsi, chacun se souviendra qu’en 2008, le Gouvernement a décidé - après que le candidat Nicolas SARKOZY ait promis durant sa campagne présidentielle le versement des allocations familiales dés le premier enfant - de réduire considérablement le montant des aides accordées aux familles les plus modestes. C’est donc par décret (décret n° 2008-409 du 28 avril 2008 relatif à la majoration unique des allocations familiales à quatorze ans) que le gouvernement a modifié une règle instaurée dans les années soixante. Alors que jusqu’à l’adoption de ce décret les allocations familiales étaient majorées de 33,51 euros à partir de 11 ans et de 59,57 euros à partir de 16 ans, elles ne font plus l’objet que d’une majoration unique à l’âge de 14 ans.

Cette décision, contestée par les associations familiales et par le conseil d’administration de la CNAF saisi pour avis du projet de décret, a permis au Gouvernement de réaliser de substantielles économies : 138 millions d’euros par an. Des économies réalisées au détriment des familles puisqu’avec cette nouvelle règle la mesure aura représenté une perte de 586 euros par famille, et ce, alors que s’annonçait une crise économique sans précédent et dont les effets se poursuivent encore. Conscients que cette mesure était dénoncée massivement par l’ensemble des acteurs concernés, François FILLON et Nadine MORANO s’étaient engagés à ce que les économies réalisées soient orientées vers d’autres aides. Or si la PAJE a, cette même année, bénéficiée d’une augmentation de 35 millions d’euros, les économies réalisées au final sur les familles ont tout de même représentées en 2008 103 millions d’Euros.

La même année 2008 émergeait une nouvelle fois le débat sur le versement des allocations familiales sous conditions de ressources. Cette proposition était notamment formulée à la page 221 du rapport rendu par la « Commission pour la libération de la croissance française » présidé par Jacques ATTALI où l’on peut lire : « Pour les dépenses de sécurité sociale, la stabilisation résultera de la conjonction de trois types de décisions annoncées plus haut : les règles de gouvernance (une seule loi de finances pour l’État, la maladie et la famille, la mise en place de crédits limitatifs pour la maladie) ; la mise sous condition de ressources des allocations familiales et une franchise proportionnée aux revenus, restant à la charge des assurés, pour les dépenses d’assurance maladie ».

Autrement dit, pour réduire la dépense sociale – qui fait partie des dépenses publiques – il n’y aurait pas d’autres choix que de continuer à transférer des dépenses sociales vers les familles. Si cette proposition n’a pas encore été appliquée, il est fort probable, dans le contexte marqué par la volonté gouvernementale d’inscrire dans la constitution l’interdiction des déficits, qu’elle soit prochainement reprise.

Et ce d’autant plus que, comme le soulignait le Journal « Le Figaro » en date du 1er février 2008 : « Principale surprise, hier, François Fillon ne rejette pas a priori l’idée de soumettre à conditions de ressources les allocations familiales, contre laquelle plusieurs députés de la majorité, dont Jean-François Copé, s’étaient élevés. Ce sujet « sera sur la table de la négociation lorsque s’engagera la réforme de la protection sociale », explique le premier ministre ».

Cette proposition qui permettrait certes de réaliser d’importantes économies n’est naturellement pas acceptable si l’on considère que les allocations familiales sont versées non pour les parents, mais dans l’intérêt des enfants.

Ces derniers n’ayant pas de revenus propres il serait inacceptable que certains enfants soient écartés de ce dispositif en raison des ressources générées par leurs parents. Si l’objet des allocations familiales est l’enfant, alors elles doivent impérativement conserver un caractère universel. Cela s’inscrit dans la continuité du pacte social imaginé par le Conseil National de la Résistance qui distingue la politique sociale de la politique fiscale. Car si les allocations familiales doivent mettre l’enfant au cœur de son existence, et donc avoir une portée universelle, il faut renouveler notre politique fiscale pour qu’elle soit plus juste et plus progressive que cela n’est le cas aujourd’hui.

Si les allocations familiales ont été initialement conçues comme un complément de salaire, destiné à inciter les couples à constituer une famille nombreuse, composée d’au moins deux enfants, force est de constater que cette prestation sociale n’est plus – aujourd’hui – en adéquation avec les évolutions sociales et sociétales.

Tout d’abord, il convient de noter que le taux de natalité en France est en nette progression depuis des années, au point qu’avec un taux de 2,01 enfants par femme en 2010 le taux de fécondité est très proche de celui de 1945. Alors que la part des budgets consacrée au financement des allocations familiales est en nette diminution. Il n’en demeure pas moins que majoritairement, les couples ont renoncé au modèle d’une famille nombreuse composée d’au moins de trois enfants. Il n’est dès lors plus adapté de concevoir les allocations familiales comme une incitation à procréer, mais de les ancrer définitivement dans une logique sociale – au contraire d’une logique familialiste – et donc par voie de conséquence, de les accorder dés le premier enfant.

Le versement des allocations familiales dès le premier enfant – comme cela est le cas dans les DOM - pourrait également constituer une mesure législative nouvelle, destinée à lutter contre la pauvreté infantile. Bien que celle-ci soit légèrement inférieure en France par rapport aux autres pays de l’OCDE, elle demeure trop élevée puisqu’elle concerne toujours 8% des enfants de 0 à 17 ans.

D’ailleurs, selon une étude de l’OCDE, en date d’avril 2011, « la pauvreté des ménages avec enfants augmente dans presque tous les pays de l’OCDE ». Cette analyse, confirmée dans son rapport « Assurer le bien-être des familles, » selon lequel : « les familles avec enfants risquent d’être pauvres davantage aujourd’hui qu’au cours des décennies précédentes » conduit l’organisme à demander aux pouvoirs publics d’intervenir à la hauteur des besoins.

Notons également que la naissance d’un enfant n’est pas sans conséquence sur le niveau de vie des parents. Une étude de l’INSEE en date de 2011 « Les revenus et le patrimoine des ménages » souligne que « la naissance provoque en moyenne un décrochage du niveau de vie par rapport à celui du reste de la population : les ménages concernés perdent 2 à 11% de leur niveau de vie entre l’année précédant la naissance et celle lui succédant immédiatement ». Le même rapport de préciser : « En effet, les prestations sociales et la fiscalité compensent grosso modo et en moyenne la variation du nombre d’unités de consommation. C’est donc le coût en termes de réduction, voire d’arrêt d’activité et d’impact sur la « carrière » qui explique le décrochage, la collectivité semblant en moyenne amortir le surcoût lié à l’arrivée d’une personne supplémentaire dans le ménage ».

Par ailleurs, bien que modeste, le versement des allocations familiales, sans condition de ressources, contribue une incitation à la reprise d’activité professionnelle des femmes, à condition que les parents ne rencontrent pas de difficultés dans l’accès aux modes de gardes de leurs enfants. Or, on constate – et le rapport de l’OCDE le confirme – que, le fait d’avoir des enfants "reste un frein" au travail des femmes. Seulement 38% des Françaises mères de trois enfants et plus travaillent contre 44% dans l’OCDE.

Ainsi, la présence d’un enfant dans un foyer a des conséquences économiques de plus en plus importantes dont l’impact n’est pas pris en compte à sa juste valeur.

Selon une enquête réalisée il y a peu par l’INSEE, notre système redistributif permet certes la compensation d’une partie des coûts engendrés par la naissance d’un enfant, « mais ne compense pas économiquement la baisse d’activité qui réduit notablement le niveau de vie ».

Les mécanismes d’attribution des allocations familiales apparaissent donc comme « déconnectés » des besoins réels. Comme le souligne un rapport de la Cour des Compte sur le financement de la branche famille, il faut considérer les allocations familiales comme une « compensation (partielle) du coût de l’enfant. Le principe qui le sous-tend est qu’il est légitime que le coût financier que représentent l’entretien et l’éducation des enfants soit partagé entre les familles elles-mêmes et la solidarité nationale, dans la mesure où les enfants représentent l’avenir de la société ». Le rapport de préciser : « De façon usuelle, le coût de l’enfant est défini comme le revenu supplémentaire dont doit disposer une famille avec enfant pour maintenir son niveau de vie inchangé ». Or nous l’avons vu, la naissance du premier enfant impacte déjà fortement le niveau de vie des couples. Nous ne pouvons donc que partager les conclusions de la Cour des Comptes selon lesquelles : « La politique familiale française reste marquée par l’inspiration nataliste originelle et par le traitement préférentiel réservé au 3ème enfant depuis la fin des années 1970. Le coût du premier, à un degré moindre celui du 2ème enfant, est peu compensé, sauf lorsque l’enfant a moins de trois ans, alors même que les familles d’un ou deux enfants sont devenues les plus fréquentes ».

Cette conception des allocations familiales, considérées comme étant rattachées plus à l’enfant qu’à la famille, doit inciter les législateurs à en tirer toutes les conséquences, à noter le basculement historique de la nature même des allocations familiales et donc à les verser dès le premier enfant, c’est tout l’objet de cette proposition de loi.

L’article 1er propose donc d’étendre le bénéfice des allocations familiales aux parents d’au moins un enfant.

Afin de financer les charges résultantes de l’application de l’article précédent, l’article 2 propose d’exclure du « bouclier fiscal » mentionné à l’article L.1649-O-A du code général des impôts, les contributions et prélèvements sociaux mentionnés aux e) et f) de cet article.

L’article 3 pour sa part, propose de compléter le gage échéant par la suppression des allocations familiales du champ des exonérations générales de cotisations visées à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale.

Proposition de loi

Article 1er

Rédiger comme suit le 1er alinéa de l’article L.521-1 du code de la sécurité sociale :

Les allocations familiales sont dues à partir du premier enfant à charge.

Article 2

Les charges qui pourraient résulter pour les organismes de sécurité sociale de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la suppression des e) et f) de l’article 1649-0 A du Code Général des Impôts.

Article 3

Les charges qui pourraient résulter pour les organismes de sécurité sociale de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par l’exclusion des allocations familiales des exonérations visées à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale

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