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Il s’agit d’améliorer la représentation démocratique

Election des conseillers municipaux dans les communes associées de la Polynésie française -

Par / 30 juin 2016

Madame Tetuanui, votre proposition de loi est ambitieuse. Elle répond à un besoin exprimé par nos concitoyens de Polynésie : améliorer leur représentation démocratique et adapter à leur territoire l’application du code électoral et du code général de nos collectivités métropolitaines.

C’est une louable intention. En effet, il faut bien prendre la mesure de toutes les spécificités, historiques, culturelles, économiques et sociales, de ces archipels situés à 20 000 kilomètres de la métropole. Il faut aussi objectivement tenir compte des contraintes territoriales particulières des archipels polynésiens, qui représentent la moitié de la superficie de la Corse, mais s’étendent sur une surface équivalente à celle de l’Europe.

À l’évidence, le régime électoral des communes et le code général des collectivités territoriales ne peuvent pas s’appliquer de manière tout à fait identique dans la bonne ville de Saint-Flour et aux îles Marquises.

C’est une question de bon sens, mais aussi de bonne compréhension et de respect de tout ce qui fait la richesse et la diversité de notre République.

Aussi, ma chère collègue, votre approche pragmatique, qui est tout à fait conforme à l’esprit de l’article 74 de la Constitution relatif à l’adaptation des lois et des règlements dans les collectivités d’outre-mer, est une bonne méthode.

Il n’est en effet pas si simple de modifier le mode de scrutin des conseillers municipaux dans les communes associées de Polynésie et d’appliquer à cette collectivité d’outre-mer diverses dispositions du code général des collectivités territoriales.

Comme cela a été rappelé précédemment, les communes de Polynésie française ont été créées voilà plus de quarante ans par une loi de 1971. Du fait des conditions géographiques et de l’histoire, trente des quarante-huit communes polynésiennes sont constituées de communes associées.

Le système a pu permettre un fonctionnement démocratique relativement efficace. Mais, au fil du temps, il a trouvé ses limites. Aujourd’hui, il ne parvient plus à assurer de véritables majorités municipales stables, garantes d’une gestion efficace.

Sur le point particulier qu’est la modification du mode de scrutin des conseillers municipaux, votre proposition de loi peut être utile.

De la même façon, bien qu’elle soit juridiquement assez complexe et qu’elle ait été heureusement précisée par des amendements en commission et par ceux du Gouvernement, l’adaptation du code électoral et du code général des collectivités territoriales est nécessaire.

Je nuancerai pourtant mon propos. Au regard du contexte local, les problèmes structurels de la Polynésie française seront évidemment loin d’être résolus avec ce seul texte.

Celui-ci pourrait tout au plus améliorer le fonctionnement démocratique des collectivités territoriales et assurer une meilleure représentation des populations, ce qui n’est déjà pas si mal. Mais, avant d’être institutionnelles, les difficultés dont souffre la Polynésie française sont d’un autre ordre : elles sont largement économiques et sociales. Je n’insisterai pas sur cet aspect des choses.

Mais, il faut en être conscient, si tout ne peut évidemment pas se régler par le cadre législatif, il est décisif de prendre des décisions fortes pour assurer à nos compatriotes de Polynésie un développement harmonieux de leur société au sein de la République.

À cet égard, je voudrais relever la qualité du récent rapport d’information de la délégation sénatoriale à l’outre-mer, intitulé avec pertinence : Une sécurisation du lien à la terre respectueuse des identités foncières : 30 propositions au service du développement des territoires. Aux termes de ce rapport, la problématique foncière est « très prégnante dans l’ensemble des outre-mer » et constitue « l’un des verrous majeurs au développement économique et social des territoires ».

Je salue l’esprit dans lequel nos collègues ont abordé cette question essentielle. Ils ont respecté les identités territoriales pour démêler la complexité juridique liée aux indivisions et aider à l’évolution des systèmes traditionnels. Quatorze des recommandations du rapport concernent ainsi directement la Polynésie. Les pouvoirs publics seraient donc bien inspirés de les étudier sérieusement.

Mais, plus généralement, l’instabilité politique chronique que connaît la Polynésie française n’est pas uniquement due – il ne faut pas se le cacher – à une mauvaise « gouvernance » des institutions locales, sur fond de corruption de certains élus.

À ce propos, les dispositions prévues à l’article 2 concernant la possibilité de création de sociétés publiques locales suscitent de notre part des réserves assez fortes. Les difficultés de cette collectivité tiennent aussi à une situation économique et sociale très inégalitaire.

Viennent se greffer sur tout cela les problèmes hautement politiques posés par la fracture, toujours actuelle et sous-jacente, entre les partisans d’un changement de statut de la collectivité et les tenants de son maintien dans la République française. Il y va tout simplement de la conception que se font nos compatriotes de Polynésie de la société dans laquelle ils veulent vivre.

Votre proposition de loi, ma chère collègue, est certes nécessaire. Mais, au regard de l’importance et de la profondeur des problèmes à résoudre, elle est loin d’être suffisante. Si elle a un défaut, c’est celui de ne traiter, de façon somme toute assez complexe, qu’un aspect marginal de la situation institutionnelle en Polynésie française. Mon groupe ne s’y opposera pas et s’abstiendra.

Toutefois, je tenais à vous adresser un message à titre personnel, ma chère collègue. Votre proposition de loi montre que vous êtes vraiment à la hauteur de la fonction de parlementaire qui vous a été confiée par les grands électeurs, donc par nos concitoyens de Polynésie.

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