Lois

Avant d’être débattu et voté en séance publique, chaque projet ou proposition de loi est examiné par l’une des sept commissions permanentes du Sénat : lois, finances, affaires économiques, affaires étrangères et Défense, affaires culturelles, affaires sociales, aménagement du territoire et du développement durable. Classées par commissions, retrouvez ici les interventions générales et les explications de vote des sénateurs CRC.

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Statut des dirigeants de sociétés

Par / 4 novembre 2008

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ferai tout d’abord une observation générale sur ce débat.

Nous consacrons cette séance, pour partie, à des textes d’origine parlementaire.

Or, comme souvent, la commission saisie au fond préconise l’adoption d’une motion de procédure. En l’occurrence, il s’agit d’une motion tendant au renvoi du texte à la commission.

Que devient, alors, l’initiative parlementaire s’il faut être issu des rangs de la majorité sénatoriale pour pouvoir déposer un texte qui soit examiné, discuté et amendé ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

Si la majorité de la commission des lois ne partage pas les attendus de la proposition de loi, chers collègues, mettons-la en débat, discutons-en, amendons les dispositions qui ne répondent pas aux attentes des uns et des autres et votons sur un texte, fût-il modifié ! Le procédé retenu aujourd’hui n’est décidément pas acceptable.

Venons-en au contenu de la proposition de loi.

Mme Christine Lagarde nous avait présenté, lors de la discussion de la loi TEPA, les mesures que le Gouvernement avait l’intention de prendre sur la question de la rémunération des dirigeants.

Elle s’exprimait en ces termes : « La relation entre le dirigeant et les instances de l’entreprise est régie par un contrat, et c’est dans ce cadre que peut être défini un panier de critères de performances. [ ...] Le conseil d’administration doit rester souverain en la matière, pour décider au cas par cas, avec l’approbation des actionnaires dont il est l’émanation. »

Mme Nicole Bricq. On a vu !

Mme Éliane Assassi. « Il n’appartient pas au régulateur qu’est l’État ou au législateur de gouverner la relation individuelle entre un dirigeant et sa société. L’objet de cet article 7 est d’introduire de la performance en fixant un cadre général. »

Il faut dire qu’à l’époque nous étions au cœur de l’affaire EADS, qui avait scandalisé l’opinion publique - parachute doré pour l’un et plan social pour les autres -, affaire qui attend toujours la conclusion de l’Autorité des marchés financiers saisie pour délit d’initié.

La proposition de loi dont nous discutons se situe dans le prolongement des amendements que nos collègues du groupe socialiste avaient déposés sur l’article concerné de la loi TEPA. Ces amendements, contrairement à aujourd’hui, avaient été exposés et débattus.

M. Jean-Louis Carrère. Exact !

Mme Éliane Assassi. Fort prévenant à l’égard des dirigeants d’entreprise, le rapporteur général avait ainsi fait adopter une proposition permettant au seul conseil d’administration des entreprises concernées de fixer les conditions de constitution d’une retraite chapeau, ne laissant que la question des primes de départ à la décision de l’assemblée générale des actionnaires.

La démocratie actionnariale est encore limitée et le dispositif de l’article 17 de la loi TEPA est si peu opératoire que, faute d’avoir lutté contre les parachutes dorés, la loi n’a fait qu’aménager la piste d’atterrissage

Seulement voilà : la crise aidant et la croissance n’étant pas au rendez-vous de la loi TEPA, cela fait quelque temps que l’opinion publique est placée devant une certaine agitation, au plus haut niveau de l’État et dans le débat politique public de manière générale, sur la question de la rémunération des dirigeants d’entreprise.

Alors, que faut-il penser des intentions que le chef de l’État affiche publiquement ?

Il déclarait notamment le 25 septembre dernier : « Les modes de rémunération des dirigeants et des opérateurs doivent être désormais encadrés. Il y a eu trop d’abus, il y a eu trop de scandales. » Dont acte !

Alors, faut-il légiférer ou non ? Faut-il revenir sur l’esprit qui animait le Gouvernement lors de la discussion du projet de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat ? Pour nous, c’est oui !

C’est oui, à partir de la proposition de loi dont nous sommes saisis et des mesures qui pourraient s’y ajouter : soumission à l’impôt des stock-options, assujettissement aux cotisations sociales, interdiction pure et simple ou très forte imposition des parachutes dorés, toutes mesures incluses dans une proposition de loi que notre groupe a récemment déposée.

La loi est l’expression de l’intérêt général et celui-ci commande aujourd’hui de légiférer sur la rémunération des cadres dirigeants de nos plus grandes entreprises. Savez-vous, mes chers collègues, combien de contribuables bénéficient aujourd’hui du dispositif spécial d’imposition des stock-options ? Ce sont 2 200 foyers fiscaux sur un total de plus de 35 millions, c’est-à-dire 0,006 % !

L’intérêt général commande de mettre un terme au niveau exorbitant et souvent injustifié des rémunérations des dirigeants surtout quand, dans le même temps, leur implication se traduit en plans sociaux et en chômage technique imposé aux salariés. En 2007, les cinquante patrons français les mieux payés ont, en moyenne, perçu 310 fois le SMIC...

M. Jean Desessard. Oh là là !

Mme Éliane Assassi. Ces rémunérations ont augmenté de 20 % en un an, progression que nombre des salariés de leurs propres entreprises auraient sans doute voulu atteindre !

Encore faut-il se souvenir que le salaire n’est que la partie émergée de l’iceberg. Ainsi, Bernard Arnault, président-directeur général du groupe LVMH, s’est vu attribuer 4,1 millions d’euros de salaire, auxquels s’ajoutent 376 millions d’euros de dividendes !

M. Alain Fauconnier. Scandaleux !

Mme Éliane Assassi. Le patron de Vallourec, pour sa part, a déclaré 12,4 millions d’euros de revenus, soit une hausse de 32 %, quatre fois supérieure à la progression du résultat par action de son entreprise. Et je ne parle pas du salaire des salariés de ce groupe ! Démonstration est ainsi faite de la parfaite inefficience des mesures de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat.

Alors, oui, mes chers collègues, il faut légiférer et nous ne pouvons que regretter et condamner que cela ne soit pas possible aujourd’hui !

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